
L’expert stratégique Abu Saleh dans une interview particulière avec (échos soudanais) : Une lecture de la scène soudanaise depuis l’indépendance et après la guerre
Dans une interview réalisée par (échos soudanais) le professeur Mohamed Hussein Abu Saleh, expert en planification stratégique et professeur dans les universités soudanaises, a présenté une lecture très approfondie de la scène soudanaise actuelle, montrant les racines des crises nationales et proposant des solutions fondamentales pour construire un nouvel État en voie de rétablissement après la guerre. Voici les points les plus marquants de sa vision :
Dialogué par : Mahjoub Al-Khalifa
Traduction: Dr.Abdelrahman Kamal Shomeina
La pénétration du renseignement dans la révolution de décembre
Le professeur Abu Saleh a confirmé que la révolution de décembre 2019 était un acte populaire authentique et spontané auquel tous les secteurs de la société soudanaise ont participé, y compris les jeunes, les partis politiques, les organisations de la société civile et les dirigeants des confréries soufis, et ont exprimé un désir clair de changement et de construction d’une nouvelle nation et à cause de l’absence de l’organisation interne, la révolution a été soumise à la plus grande pénétration des services de renseignements étrangers et plusieurs parties extérieures ont exploité de cette absence et intervenus en finançant et en polissant des groupes politiques spécifiques pour dominer la scène sans aucune procuration de la rue.
Voler la révolution et la diriger à travers les médias pour servir des agendas étrangers
Le professeur Abu Saleh a expliqué que les services de renseignement étrangers utilisaient les médias et les organisations pour présenter des dirigeants fabriqués qui étaient employés pour servir des projets étrangers qui n’avaient rien à voir avec les aspirations de la révolution. Il a confirmé qu’il y avait un financement important pour soutenir ces dirigeants au détriment de la véritable volonté des révolutionnaires, et il a en plus cité des preuves trouvé dans les mémoires de l’ancien directeur de la CIA dans son livre intitulé (Au cœur de la tempête) concernant la fabrication du dirigeants leadership et de l’opinion publique utilisant les médias et les outils de renseignement. Abu Saleh a déclaré que malgré ses tentatives personnelles pour convaincre les jeunes du danger de cette tendance extérieure, la scène politique a été détournée au profit de partis étrangers.
L’échec des partis soudanais, la solution est de les réduire
Le professeur Abu Saleh estime que les partis soudanais n’ont pas réussi depuis l’indépendance à présenter une idée nationale unificatrice parce qu’ils ne sont pas qualifiés pour le faire. Il considérait que c’était le plus grand obstacle à la construction de l’État, car ces partis présentaient des idéologies étroites et des programmes partisans. Il a expliqué que chaque coup d’État militaire au Soudan était soutenu par un parti politique, à commencer par le coup d’État du parti communiste, puis par le parti Baas socialiste arabe et jusqu’au coup d’État du parti islamiste de 1989 mené par Omar el-Béchir, qui a à son avis détruit les chances d’une véritable transition démocratique.
Le professeur Abu Saleh a souligné que les armes ne devraient être utilisées que pour protéger la patrie, et pas de résoudre les différends politiques, et que le recours du Soudan aux solutions militaires au lieu de la pensée politique et stratégique a affaibli l’État et déchiré son tissu national.
Le professeur Abu Saleh a appelé à réduire le nombre de partis politiques au Soudan à un nombre limité de partis efficaces avec des programmes nationaux forts, considérant que leur grand nombre est une cause directe de chaos politique et de manque de stabilité.
Pénétration extérieure aux mouvements armés
Le professeur Abu Saleh estime que le financement militaire et politique des mouvements armés peut s’expliquer que dans le cadre d’un soutien extérieur direct, citant la capacité de certains dirigeants de mouvements à soutenir des milliers de soldats, à les former et à payer leurs salaires sans être un outil de pénétration extérieure, ce qu’il considère comme une preuve concluante de la pénétration du renseignement dans les articulations de ces mouvements armés.
Le contrôle de sécurité et de moralité des dirigeants vers une phase fondamentale et non transitoire
Le professeur Abu Saleh a appelé à la nécessité pour tous les candidats à la direction du Soudan de se soumettre à un examen sécuritaire, judiciaire et moral transparent pour garantir l’éligibilité et la crédibilité des dirigeants, soulignant l’importance d’écarter toute personne impliquée dans la corruption du poste de direction.
Le professeur Abu Saleh a également appelé à une période fondatrice, et non à une autre période de transition, au cours de laquelle une constitution permanente serait élaborée à laquelle les institutions de l’État adhéreraient. Il a également suggéré d’organiser une conférence fondatrice à laquelle participeraient des universitaires et des experts, notamment des professeurs des universités représentant toutes les régions et tous les États du Soudan. Choisis uniquement sur la base de leurs compétences et de leur loyauté nationale, loin des affiliations politiques Il s’agit donc de formuler un projet d’État doté d’une vision nationale unifiée et d’une constitution permanente qu’aucun futur gouvernement ne pourra violer.
Abu Saleh a également souligné la nécessité de sélectionner un Conseil de souveraineté composé de personnalités matures, sages et compétentes pour diriger la phase fondatrice vers la construction d’un État véritablement institutionnel.
Le Soudan après la guerre avec des savants, pas des politiciens
Le professeur Abu Saleh a exprimé ses regrets face à la détérioration de l’état de l’éducation et de la recherche scientifique au Soudan qui a été le berceau de la science et de la civilisation ancienne, soulignant qu’il n’y a pas d’avenir pour le Soudan sans une véritable planification stratégique incluant tous les secteurs.
Il a déclaré que la renaissance du Soudan ne se fera pas par le biais des politiciens et les conférences politiques, mais plutôt par les énergies des savants du pays , en citant que tous les pays qui se sont levés après la Seconde Guerre mondiale, l’ont fait grâce à des visions stratégiques claires, ce qui manque au Soudan aujourd’hui, appelant à orienter les énergies vers la science et la connaissance plutôt que vers des conférences politiques.
Le professeur a suggéré que plus de 20 000 savants et experts soudanais de toutes les disciplines se réunissent pour élaborer un plan stratégique global pour la construction de l’État, comme l’ont fait la Chine, Singapour et la Malaisie. Il a expliqué que le succès de ces pays était dû à leur confiance dans la connaissance et non dans la politique.
Le professeur Abu Saleh a conclu sa vision avec des attentes optimistes pour le Soudan d’après-guerre et la possibilité qu’il se transforme en un pays complètement nouveau, se remettant de toutes les distorsions de l’ancien, si la phase fondatrice est bien gérée. Il a souligné que l’apparition de BRICS a rétabli l’équilibre mondial et a créé une opportunité pour le Soudan de se réaffirmer et de se repositionner au niveau régional, loin des pressions des forces traditionnelles telles que l’Amérique, la France et la Grande-Bretagne.